Depuis une dizaine d’années, les valeurs, les causes sociales, se sont insinuées partout, que ce soit dans la communication politique ou celle des marques. Avec la chute des croyances religieuses et la multiplication des déceptions politiques, nous nous tournons désormais de plus en plus vers les marques, considérant l’acte d’achat comme un moyen de choisir les valeurs sociétales auxquelles nous adhérons, et pour lesquelles nous souhaitons agir.

Une façon de considérer l’acte d’achat comme un choix de société, dans le fond.

Ainsi, ces dernières années, nous avons pu constater l’évolution de la communication des marques, qui ont commencé à s’associer, de plus en plus, à des causes sociétales telles que le féminisme, l’inclusion, l’écologie et d’autres choix de vie. Si la défense de ces causes peut être légitime, il est tout de même curieux d’observer que celles-ci étaient auparavant totalement absentes de leur communication, et sont désormais mises en avant par toute une série de marques, souhaitant se positionner, tel un rempart face aux injustices et menaces de notre temps.

C’est ce que l’on appelle le Storytelling antagoniste : utiliser des antagonistes, des menaces et des défis de notre temps, pour associer la marque à une cause et inciter les consommateurs à faire des choix de consommation en fonction de leurs engagements sociétaux.

Si on peut facilement observer ce phénomène chez la plupart des marques que l’on consomme au quotidien, ce phénomène soulève néanmoins quelques problématiques.

En effet, de nombreux consommateurs choisissent désormais leurs marques en fonction des valeurs qu’elles prétendent défendre, sans vérifier la sincérité de leur engagement.

Certaines marques, malgré un discours en faveur de l’inclusion et du respect de l’être humain, peuvent s’afficher par exemple en défenseurs de violences symboliques, et soutenir en réalité des activités qui engendrent des violences dures, cruelles même parfois, telles que l’exploitation humaine, le recours à la main-d’œuvre infantile, la dureté managériale ou tout simplement une maintenir tout activité polluante néfaste pour le plus grand nombre.

Un autre problème réside dans le fait que certaines marques utilisent très souvent les causes et les victimes comme de simples instruments pour augmenter leur notoriété et leurs ventes, sans réellement que cette communication n’agisse en faveur de l’amélioration des conditions des populations visées.

Cela peut mener à une forme d’achat de conscience par les consommateurs, qui se retrouvent finalement piégés dans une émotion superficielle autour de ces problématiques, plutôt que d’être encouragés à remettre en question les véritables enjeux. Cette approche peut même parfois diviser la population plutôt que de la rassembler, opposer les femmes aux hommes, les minorités aux majorités, les individus être eux, pointant désormais les comportements les moins vertueux, les uns des autres.

Une polarisation de la société  particulièrement contre-productive dans le monde actuel où l’unité est primordiale pour relever certains défis qui nous menacent.

En conclusion, si le Storytelling antagoniste semble bel et bien avoir gagné le discours des marques ces dernières années, les incitant à s’approprier des causes sociétales pour se démarquer et attirer les consommateurs sensibles à ces valeurs, il reste primordial d’adopter un regard critique envers ces stratégies de communication et de ne pas se laisser aveugler par des discours antagonistes, sans vérifier la véracité de leurs engagements.

Si les marques souhaitent s’associer à des causes, qu’elles le fassent, mais qu’elles s’engagent vraiment. Les consommateurs doivent être plus exigeants envers les marques qu’ils consomment et vérifier la cohérence entre leur communication et leurs actions réelles.

Enfin, il est toujours préférable de privilégier des actions concrètes et/ou s’engager politiquement pour véritablement contribuer à l’amélioration de notre société, en ne perdant pas de vue que la démocratie, devrait toujours être la façon la plus légitime et directe d’agir en société.